Prise en charge de la douleur dans la colique néphrétique


Abstract

Les antiinflammatoires non stéroïdiens (AINS) constituent le traitement de premier choix pour soulager la douleur dans la colique néphrétique. Si les AINS sont contre-indiqués, mal tolérés ou qu’ils n’apportent pas un soulagement suffisant de la douleur, un analgésique morphinique peut être essayé. On ne dispose pas de preuves quant à l’efficacité des spasmolytiques.

La colique néphrétique est une affection fréquente et souvent récidivante, qui nécessite une prise en charge immédiate. Les crises douloureuses sévères sont incontestablement les plaintes les plus importantes. Dans la majorité des cas, c’est l’obstruction de l’uretère par un calcul qui est à l’origine de la douleur. Une prise en charge efficace de la douleur est essentielle, et celle-ci ne peut pas être différée en attendant le diagnostic. Cet article tente de situer la place des différents médicaments proposés dans le traitement de la colique néphrétique.


Antiinflammatoires non stéroïdiens

Les antiinflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont les médicaments de premier choix pour contrôler la douleur dans la colique néphrétique. Dans les études à ce sujet, les AINS sont apparus aussi efficaces voire plus efficaces que les analgésiques morphiniques. Vu l’effet des AINS sur la synthèse des prostaglandines, ils agissent directement sur le mécanisme déclenchant la colique néphrétique. Les AINS qui ont été le plus étudiés sont le diclofénac, l’indométacine et le kétorolac. Leur efficacité est probablement comparable. En milieu hospitalier, l’administration se fera de préférence par voie intraveineuse, tandis qu’en dehors de l’hopital, elle se fera plutôt par voie intramusculaire ou rectale. L’administration orale n’est pas un premier choix étant donné que des nausées font souvent partie du tableau clinique. [N.d.l.r. : les spécialités Diclofenac EG et Voltaren, à base de diclofénac, sont les seules spécialités à base d’un AINS pour lesquelles la colique néphrétique figure explicitement comme indication dans la notice; la posologie mentionnée dans la notice est de 75 mg de diclofénac par voie i.m., à répéter éventuellement après quelques heures; l’injection i.m. de 75 mg de diclofénac peut éventuellement être suivie de l’administration d’un suppositoire, avec un maximum de 150 mg de diclofénac par jour]. Les préparations à libération prolongée n’ont pas de place vu la nécessité d’un contrôle rapide de la douleur. Les effets indésirables gastro-intestinaux connus des AINS ne posent que rarement des problèmes lors d’une administration unique. [N.d.l.r.: attention aux réactions allergiques, par ex. bronchospasme chez les patients présentant une hypersensibilité connue à l’acide acétylsalicylique ou aux AINS.] Un usage occasionnel pendant la grossesse n’entraînera pas la fermeture prématurée du canal artériel [n.d.l.r.: l’usage prolongé pendant le troisième trimestre de la grossesse est par contre déconseillé, non seulement en raison de l’effet sur le canal artériel, mais aussi parce que la grossesse et l’accouchement risquent d’être prolongés, et que des hémorragies peuvent survenir chez la mère et chez l’enfant]. Il est bien sûr important de ne pas dépasser les doses maximales des AINS.

Il n’est pas prouvé que l’administration prophylactique d’AINS, dans le but de diminuer la réaction inflammatoire et de prévenir les récidives, soit utile, ce qui augmente en outre le risque d’effets indésirables.


Analgésiques morphiniques

Si les AINS sont contre-indiqués, mal tolérés ou qu’ils n’apportent pas un contrôle suffisant de la douleur, un analgésique morphinique peut être envisagé. La péthidine (100 mg i.m.) est classiquement présentée comme le meilleur choix vu que son effet sur le tonus des muscles lisses de l’uretère serait plus faible qu’avec les autres analgésiques morphiniques. En ce qui concerne l’effet des analgésiques morphiniques sur les muscles lisses de l’uretère, des résultats contradictoires ont toutefois été observés.

Avec les analgésiques morphiniques, il faut tenir compte d’un risque d’effets indésirables graves tels dépression respiratoire, rétention urinaire, constipation, et d’un risque de dépendance. Leur utilisation pendant la grossesse est déconseillée [n.d.l.r.: cela vaut surtout pour l’utilisation quelques heures avant l’accouchement (entre autres vu le risque de dépression respiratoire chez le nouveau-né), et pour l’utilisation prolongée (vu le risque de dépendance et de manifestations de sevrage chez le nouveau-né)].


Spasmolytiques

Auparavant, les spasmolytiques anticholinergiques étaient classiquement administrés, en association ou non à un AINS, dans la colique néphrétique. On ne dispose cependant d’aucune preuve quant à l’efficacité de ces médicaments. De plus, ils sont souvent à l’origine d’un iléus, ce qui rend parfois le patient plus malade qu’il n’est déjà. Les médicaments parasympathicolytiques peuvent entraîner en outre une sécheresse de la bouche, une augmentation de la tension intra-oculaire et une rétention urinaire. L’utilisation de l’association à base du spasmolytique bromure de butylhyoscine et de l’analgésique métamizole ne se justifie pas vu le rapport bénéfices-risques défavorable. [N.d.l.r.: cette association est commercialisée en Belgique sous le nom Buscopan Compositum: les formes orales et rectales ont été retirées du commerce; la forme pour administration parentérale est encore disponible.]


Divers

  • Des antibiotiques sont souvent prescrits étant donné la présence fréquente d’une leucocyturie. L’administration d’antibiotiques est cependant presque toujours superflue vu qu’il s’agit souvent d’une leucocyturie stérile due à la réaction inflammatoire provoquée par la lithiase, et rarement seulement d’une pyurie due à une infection bactérienne.
  • L’intérêt de l’hydratation dans le but d’augmenter la diurèse et ainsi de favoriser l’élimination du calcul n’est pas démontré.
  • Avec la desmopressine, administrée par voie nasale, un effet favorable sur la douleur dans la colique néphrétique a été observé dans une étude non randomisée. Des données supplémentaires s’avèrent toutefois nécessaires pour préciser la place de la desmopressine dans la prise en charge de la colique néphrétique.

D’après

  • E. Van Laecke en W. Oosterlinck: Pathofysiologie van de nierkoliek en de therapeutische implicaties ervan. Tijdschr. voor Geneesk. 52 : 1231-1234(1996)
  • W. Oosterlinck en G. Villeirs: Diagnostiek en behandeling van nierkoliek. Tijdschr. voor Geneesk. 59 : 693-697(2003)
  • N. Zabihi en J.M.H. Teichman: Dealing with the pain of renal colic. Lancet 358 : 437-438(2001)

Note de la rédaction

Cet article discute de la prise en charge à domicile de la douleur associée à la colique néphrétique. Dans certaines circonstances, l’hospitalisation du patient s’impose, par ex. pendant la grossesse, en présence d’un rein fonctionnel unique, d’anurie, de fièvre supérieure à 38°C, ou de douleur persistante malgré un traitement approprié.