Depuis la parution de nos Folias consacrés au tirzépatide (Folias de septembre 2023 et de novembre 2024), l’étude SURMOUNT-5 a été publiée. Il s’agit de la première RCT comparant directement le tirzépatide et le sémaglutide injectable, chez des patients non diabétiques et souffrant d’obésité. Voici un court compte rendu de cette étude et quelques commentaires.

Messages clés

  • L’étude SURMOUNT-5 est la première RCT comparant directement le tirzépatide et le sémaglutide entre eux, à la dose maximale tolérée. Les patients inclus ne sont pas diabétiques et présentent un BMI ≥ 30 Kg/m² (ou ≥ 27 Kg/m² avec au moins une pathologie associée à l’obésité).
  • L’efficacité du tirzépatide sur le poids a été supérieure à celle du sémaglutide injectable (perte de 8 kilos supplémentaires après 72 semaines de traitement ; p<0,001), mais le caractère « open label » de cette étude pourrait introduire un biais de performance.
  • La tolérance digestive a été moins bonne avec le sémaglutide (responsable de quasi 2 fois plus d’arrêts de traitement). Par contre, il y a eu plus de réactions au point d’injection avec le tirzépatide (8,6 % versus 0,3 %).
  • Conclusion du CBIP : Dans l’obésité et en dehors du diabète, le tirzépatide entraîne une perte de poids plus importante que le sémaglutide. Il reste à démontrer si cette différence se traduit par une réduction des complications cliniques à long terme de l’obésité. Chez les patients atteints de diabète, la supériorité clinique du tirzépatide par rapport au sémaglutide reste incertaine, tant pour le contrôle du poids et de la glycémie que pour la prévention des complications cliniques.

En quoi cette étude est-elle importante ?

Dans l’article Folia de novembre 2024, nous indiquions que des données indirectes laissaient penser que le tirzépatide, un double analogue GIP/GLP-1,  pourrait entraîner une perte de poids plus importante que des analogues du GLP-1 comme le sémaglutide.

Les données indirectes sont issues (voir Folia de novembre 2024) :

  • d’une méta-analyse en réseau chez des patients atteints de diabète de type 2 et comparant les analogues du GLP1 entre eux.
  • d’une étude de cohorte rétrospective comparant des nouveaux utilisateurs de tirzépatide versus sémaglutide chez des patients avec obésité, et diabète de type 2 pour la moitié d’entre eux.

Nous y signalions également une RCT en cours évaluant son effet pondéral chez des patients non diabétiques et souffrant d’obésité, constituant la première comparaison directe avec le sémaglutide (étude SURMOUNT-5).1-3 Cette étude est désormais publiée ; en voici les principaux éléments.

Protocole de l’étude

  • Il s’agit d’une RCT « open-label » sponsorisée par la firme qui commercialise le tirzépatide.
  • Les patients inclus (environ 750) étaient exclusivement non diabétiques. Ils ont reçu soit du tirzépatide soit du sémaglutide injectable, à la dose maximale tolérée, en plus d’une intervention sur le mode de vie. Ils ont été traités pendant 72 semaines.

Résultats en bref

  • L’efficacité sur le poids (critère primaire de cette étude) est supérieure chez les patients qui ont reçu le tirzépatide. En effet, les patients sous tirzépatide ont perdu environ 20% de leur poids (soit 23 kilos environ), contre environ 14% sous sémaglutide (soit 15 kilos). La différence se traduit par une perte de 8 kilos supplémentaires avec le tirzépatide par rapport au sémaglutide, après 72 semaines de traitement (p<0,001).
  • La même proportion de patients (environ 9 patients sur 10) a atteint la dose maximale tolérée de 15 mg s.c./semaine pour le tirzépatide et de 2,4 mg s.c./semaine pour le sémaglutide.
  • La tolérance digestive a été moins bonne avec le sémaglutide (quasi 2 fois plus d’arrêts de traitement liées aux effets indésirables gastro-intestinaux).
  • Il y a eu plus de réactions au point d’injection avec le tirzépatide (8,6 % versus 0,3 %).

Limites de l’étude

  • La limite principale est que l’étude a été menée de manière non aveugle.
  • Il s’agit d’une étude qui est sponsorisée par la firme qui commercialise le tirzépatide.
  • Les caractéristiques de la prise en charge hygiéno-diététique concomitante sont peu détaillées.

Commentaire du CBIP

  • Cette étude SURMOUNT-5 montre une efficacité supérieure sur le poids avec le tirzépatide en comparaison au sémaglutide, dans une population souffrant d’obésité et exclusivement non diabétique. Néanmoins, il nous semble utile de formuler quelques commentaires.
    • Le caractère « open-label » de cette étude constitue une limite  importante, car il peut avoir influencé l’ampleur de la différence observée. La connaissance du traitement reçu — dans un contexte où des données antérieures laissaient déjà supposer une supériorité du tirzépatide — peut induire un biais de performance : des patients convaincus de recevoir la molécule la plus efficace peuvent être davantage engagés dans d’autres changements de mode de vie, tandis que les cliniciens, conscients du traitement administré, peuvent ajuster certains comportements ou décisions cliniques susceptibles d’influencer les résultats.
    • La perte de poids conférée dans cette étude tant par le tirzépatide que le sémaglutide est cliniquement pertinente. Nous ne savons pas encore si l’écart de perte de poids entre ces 2 molécules se traduirait par une différence d’efficacité dans la prévention des complications cliniques à plus long terme liées à l’obésité.
  • Plus de données sont nécessaires, en particulier sur des critères d’évaluation forts (autrement dit, sur les complications à long terme), pour préciser la place des doubles analogues GIP/GLP- 1 en comparaison aux analogues du GLP-1, tant dans le diabète de type 2 que dans l’obésité.
  • Pour mémoire, plusieurs analogues du GLP-1 ont déjà montré un impact clinique positif, au-delà de la perte de poids.
    • Dans le diabète, des bénéfices cardiovasculaires ont été mis en évidence dans les études LEADER (liraglutide) et SUSTAIN 6 (sémaglutide injectable) (voir Folia de février 2017 et Folia de mai 2019 pour quelques commentaires concernant ces études).
    • Dans l’obésité en dehors du diabète, l’étude SELECT a montré des bénéfices cardiovasculaires du sémaglutide injectable (voir Folia de janvier 2024 pour quelques commentaires concernant cette étude).
    • Nous reviendrons prochainement dans nos Folias sur les résultats de 2 études. D’une part, l’étude FLOW qui montre un effet positif du sémaglutide injectable sur la progression de la maladie rénale chez des patients diabétiques avec atteinte rénale chronique. D’autre part, l’étude SOUL qui montre un bénéfice du sémaglutide oral sur les complications cardiovasculaires chez des patients diabétiques à haut risque de complications cardiovasculaire et/ou rénale.
  • Concernant le tirzépatide, deux études randomisées et à large échelle sont actuellement en cours , tant dans le diabète que dans l’obésité.
  • Conclusion du CBIP : Dans l’obésité et en dehors du diabète, le tirzépatide entraîne une perte de poids plus importante que le sémaglutide. Il reste à démontrer si cette différence se traduit par une réduction des complications cliniques à long terme de l’obésité. Chez les patients atteints de diabète, la supériorité clinique du tirzépatide par rapport au sémaglutide reste incertaine, tant pour le contrôle du poids et de la glycémie que pour la prévention des complications cliniques.

Noms des spécialités concernées:

  • Sémaglutide injectable dans l’obésité: Wegovy® (voir Répertoire)
  • Tirzépatide: Mounjaro® (voir Répertoire)

Sources

1 Aronne LJ, Horn DB, le Roux CX et al. Tirzepatide as Compared with Semaglutide for the Treatment of Obesity. NEJM 2025;393:26-36 (DOI: 10.1056/NEJMoa2416394)
2 NEJM Journal Watch 15/05/2025: Tirzepatide vs. Semaglutide for Patients with Obesity: A Head-to-Head Trial.
3 ACP Journal Club (Ann Intern Med 2025;178:JC122; doi:10.7326/ANNALS-25-04321-JC): In adults with obesity but without type 2 diabetes, tirzepatide increased weight loss at 72 wk compared with semaglutide