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Bexsero® (Répertoire 12.1.2.5.) a été, en 2017, le premier vaccin contre les infections invasives à méningocoques du sérogroupe B disponible en Belgique [cf. Informations récentes mars 2017 dans les Folia d’avril 2017]. Il peut être utilisé à partir de l’âge de 2 mois. Depuis lors, un 2e vaccin a été commercialisé : Trumenba®, indiqué à partir de l’âge de 10 ans. Il n’y a pas d’études comparatives entre Bexsero® et Trumenba®. Contrairement aux autres types de méningocoques, il n’est pas possible de développer un vaccin polysaccharidique conjugué pour le méningocoque B, ce qui constitue un inconvénient pour l’immunogénicité des vaccins contre le méningocoque B [voir Folia de juillet 2013].
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Les indications de Bexsero®1, le prix (86,52 € par injection) et les modalités de délivrance (sur prescription, aucun remboursement) n’ont pas changé depuis 2017.
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Les méningocoque du sérogroupe B restent les principaux responsables d’infections invasives à méningocoques en Belgique (les données les plus récentes datent de 2021). Pour plus de détails, cf. Les infections invasives à méningocoques en Belgique.
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Le schéma de vaccination chez l’enfant de moins de 1 an a été simplifié ces dernières années, passant de 3 injections + 1 dose de rappel à 2 injections + 1 dose de rappel.1 Voir Répertoire 12.1.2.5. et Conseil Supérieur de la Santé (CSS 9485) pour plus de détails sur les schémas de vaccination par tranche d’âge.
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Protection en conditions réelles. Des études observationnelles menées au Royaume-Uni (2020)2, au Portugal (2020)3 et en Espagne (2023)4 montrent une efficacité de 60 à 80 % contre les infections invasives à méningocoques du sérogroupe B chez les enfants vaccinés. L’étude britannique suggère une protection durant au moins 2 ans chez les nourrissons après vaccination complète. Le risque de biais et de facteurs de confusion ne peut être exclu dans les études observationnelles. Il est difficile de mesurer l’efficacité avec précision en raison de la rareté de la maladie et des fluctuations observées d’une année à l’autre. Pour plus de détails, cf. Protection en conditions réelles.
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Le portage oropharyngé concerne le plus souvent les adolescents et les jeunes adultes, qui constituent de ce fait une source d’infection.5 En 2017 déjà, les études observationnelles indiquaient que Bexsero® n’a pas d’effet sur le portage oropharyngé. Une étude randomisée (2020)6 menée en Australie auprès de plus de 24 000 adolescents âgés de 15 à 18 ans n’a pas davantage identifié un quelconque effet de Bexsero® sur l’incidence de portage oropharyngé des méningocoques du sérogroupe B (pas plus que de ceux des sérogroupes A, C, W, X et Y). Qui dit absence d’effet sur le portage oropharyngé, dit absence d’effet sur la transmission et absence d’immunité de groupe (herd immunity).
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Innocuité. Ces dernières années, il n’y a eu aucun signalement d’effets indésirables graves. Le profil d’innocuité est favorable. Des réactions locales et de la fièvre (en particulier chez les jeunes enfants, lorsque Bexsero® est administré en même temps que d’autres vaccins) sont fréquemment observées (cf. Répertoire 12.1.2.5.).
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Les recommandations en Belgique.
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Dans son Avis de 2019 (CSS 9485), le Conseil Supérieur de la Santé ne recommande pas la vaccination systématique contre le méningocoque de type B, mais indique que la vaccination peut être envisagée individuellement pour les enfants de 2 mois à 5 ans et pour les adolescents de 15 à 19 ans. Les arguments contre la vaccination systématique des nourrissons sont le faible rapport coût-efficacité du Bexsero® (vaccin coûteux et maladie rare) et l’absence d’immunogénicité collective. La vaccination contre le méningocoque de type B est conseillée pour les groupes à risque (personnes atteintes d’asplénie ou de certaines autres formes d’immunodéficience) [voir aussi l’avis relatif à la vaccination de patients immunodéficients, CSS 9158, 2019). Le CSS prépare actuellement un avis sur la vaccination antiméningococcique des groupes à risque (notamment les personnes présentant un risque accru en raison d’une affection sous-jacente).
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Les Communautés ont formulé des recommandations en matière de vaccination post-exposition (c.-à-d. la vaccination des personnes entrées en contact avec un cas index présentant une infection invasive à méningocoques du sérogroupe B). Pour plus de détails, cf. Vaccination post-exposition.
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Note. Depuis avril 2022, les autorités sanitaires françaises recommandent la vaccination systématique des enfants (à partir de l’âge de 2 mois et avant l’âge de 2 ans) contre le méningocoque du sérogroupe B. D’après La Revue Prescrire,7 l’efficacité de cette stratégie de vaccination généralisée des nourrissons est difficile à quantifier, dans un contexte de faible circulation du méningocoque B.
Conclusion du CBIP, 5 ans après commercialisation : Bexsero® protège partiellement l’enfant vacciné contre les infections invasives à méningocoques du sérogroupe B, et la protection perdure vraisemblablement pendant 2 ans. Il n’y a pas d’effet sur le portage oropharyngé, et donc pas d’effet sur la transmission, pas plus qu’il n’y a d’immunité de groupe (herd immunity). Compte tenu des incertitudes quant à l’ampleur de l’efficacité et la durée de protection de cette vaccination contre une maladie très grave mais rare, la question de la vaccination reste un dilemme. Le rapport coût-efficacité doit également être pris en considération.
Les infections invasives à méningocoques en Belgique
Les infections invasives à méningocoques sont rares en Belgique (< 1 cas pour 100 000 habitants par an), mais elles demeurent une priorité pour la santé publique en raison de leurs complications aux conséquences durables (10 à 20 %, p. ex. perte auditive, épilepsie, retard de développement) et de la mortalité élevée (5 à 10 %). En 2021, comme en 2020, le Centre national de référence de Neisseria Meningitidis de Sciensano a enregistré une incidence plus faible d’infections invasives à méningocoques par rapport aux années avant la pandémie de COVID (Sciensano 2021). Les enfants de 0 à 4 ans et les jeunes de 15 à 19 ans sont les plus souvent touchés. Le sérogroupe B reste le principal responsable en Belgique, avec 15 cas (62,5 %) recensés en 2021.
- En Belgique, on a dénombré 24 cas en 2021 et 55 cas en 2020 (contre un peu plus de 100 cas en moyenne par année entre 2010 et 2019). Les tranches d’âge les plus touchées en 2021 étaient, comme les années précédentes, les enfants âgés de 0 à 4 ans (1,8 cas/100 000, en particulier les enfants âgés de < 1 an, avec 3,5 cas/100 000) et les jeunes âgés de 15 à 19 ans (1,1 cas/100 000).
- Chiffres pour les sérogroupes autres que le B : sérogroupe W (7 cas, 29,2 %) ; sérogroupe C (1 cas) ; sérogroupe Y (1 cas). Deux enfants (âgés entre 0 et 4 ans, infectés par un méningocoque du sérogroupe W) sont décédés.
Protection en conditions réelles
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Les premières données de protection sont parues en 2017 au Royaume-Uni, où Bexsero® fait partie des vaccinations de base du nourrissons depuis 2015 (2 doses + 1 rappel à l’âge de 1 an). Dix mois après le début du programme de vaccination, on a observé une diminution de 50 % des nouvelles infections invasives à méningocoque du sérogroupe B par rapport aux années antérieures [cf. Informations récentes dans les Folia d’avril 2017]. Une étude de suivi a également établi que, durant la période 2015-2018, l’incidence d’infections invasives à méningocoques du sérogroupe B en Angleterre était, parmi les tranches d’âge éligibles à la vaccination, inférieure à l’incidence prévue sur la base des années précédant le début du programme de vaccination.2 En effet, 63 cas y ont été diagnostiqués, alors que 253 étaient attendus. Cela correspond à un ratio de taux d’incidence de 0,25 [IC à 95 % de 0,19 à 0,36], soit une baisse de 75 % dans les tranches d’âge éligibles à une vaccination complète. Les investigateurs ont calculé une protection de 59 % chez les enfants entièrement vaccinés, mais les intervalles de confiance étaient larges : de -311 % à 87% (non statistiquement significatifs). Les investigateurs imputent les larges intervalles de confiance au faible nombre de cas. Ils signalent que la dose de rappel, administrée à l’âge de 1 an, offre une protection durant au moins 2 ans.
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Une étude cas-témoins portugaise (période 2014-2019) a révélé que les enfants et les adolescents hospitalisés pour une infection invasive à méningocoques du sérogroupe B (les « cas », n=69, âge médian de 24 mois), avaient 5 fois moins de chances d’avoir été entièrement vaccinés contre les méningocoques du sérogroupe B que les enfants appariés sans infection invasive à méningocoques du sérogroupe B (les « témoins », n=142) : 7,2 % vs 23,1 % (différence statistiquement significative).3 L’efficacité vaccinale a été estimée à 79 %. Les chances qu’un enfant soit entièrement vacciné contre les méningocoques du sérogroupe B étaient également 5 fois moins élevées parmi les sujets atteints d’une infection invasive à méningocoques « de tout sérogroupe » que parmi les témoins, mais il y avait peu de cas d’infections invasives dues à d’autres sérogroupes que le sérogroupe B.
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L’étude cas-témoins espagnole (période 2015-2019) a dégagé que les enfants âgés de < 5 ans atteints d’une infection invasive à méningocoques (les « cas », n=306 dont 80 % avec infection à méningocoques du sérogroupe B et 20 % avec infection à méningocoques d’un autre sérogroupe) avaient moins de chances d’être entièrement vaccinés contre les méningocoques du sérogroupe B que les enfants appariés sans infection invasive à méningocoques (les « témoins », n=1 224).4 Les investigateurs ont calculé une protection de 76 % contre les infections invasives à méningocoques de tout sérogroupe, et une protection de 71 % contre les infections invasives à méningocoques du sérogroupe B. La protection contre les formes ‘sévères’ (décès, admission en unité de soins intensifs ou conséquences durables, 207 enfants sur 306) d’infections invasives à méningocoques de tout sérogroupe s’élevait à 71 %, tandis qu’elle était de 70 % pour le sérogroupe B. Des souches du sérogroupe B présumées couvertes par Bexsero® ont été identifiées dans 44 cas, dont aucun n’était vacciné.
Quelques commentaires sur les études
Le risque de biais et de facteurs de confusion ne peut être exclu dans les études observationnelles. Ainsi, il est un fait connu que les enfants issus de classes sociales supérieures sont moins touchés par les infections invasives à méningocoques.3,4 Au Portugal et en Espagne, le vaccin contre les méningocoques du sérogroupe B n’est pas remboursé. De ce fait, il est possible que les vaccinés aient été plus nombreux parmi les enfants issus d’une classe sociale supérieure, qui sont déjà moins « à risque ».
De plus, les souches circulantes de méningocoques du sérogroupe B, et donc possiblement aussi les souches présumées couvertes par Bexsero®, varient d’une région à l’autre. Il est dès lors difficile d’extrapoler les résultats de ces études à d’autres régions.
Il est en outre difficile de mesurer l’efficacité avec précision en raison du faible nombre de cas et des fluctuations observées d’une année à l’autre.
Vaccination post-exposition
Les Communautés ont formulé des recommandations en matière de vaccination post-exposition, c.-à-d. la vaccination des personnes entrées en contact avec un cas index présentant une infection invasive à méningocoques du sérogroupe B. Les données sont actuellement insuffisantes pour évaluer l’efficacité de cette vaccination post-exposition.
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Fédération Wallonie-Bruxelles : nous citons le document « Infections invasives à méningocoques » (version de février 2020) : « Lorsque ≥ 2 cas liés chez des personnes vivants sous le même toit ou fréquentant la même collectivité surviennent dans une période d’1 mois maximum, une vaccination contre le méningocoque C, ACWY ou B (si souche couverte par le vaccin) pourra être recommandée à toutes les personnes vivant sous le même toit ou fréquentant la même collectivité, y compris le cas. La vaccination sera discutée avec l’inspecteur. ».
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Nous citons la guideline « RICHTLIJN INFECTIEZIEKTEBESTRIJDING VLAANDEREN – MENINGOKOKKOSE – meningokokkenziekte » (les informations relatives à la vaccination ont été actualisées en décembre 2022) : “Er wordt geen postexpositievaccinatie aanbevolen bij een solitair geval van invasieve meningokokkeninfectie veroorzaakt door een serogroep B omdat dit vaccin meerdere dosissen vereist die niet binnen 4 weken kunnen worden gegeven. MenB vaccinatie wordt wel aanbevolen bij een cluster veroorzaakt door serogroep B bij contacten die profylaxe kregen en niet werden gevaccineerd in de voorbije 12 maanden.”
Pour l’organisation/la mise en œuvre de la vaccination post-exposition, il est préférable de demander conseil auprès des services en charge de la lutte contre les maladies infectieuses au sein des Communautés.
Sources spécifiques
1 EMA. Bexsero®. EPAR.
2 Ladhani SN, Andrews N, Parikh SR et al. Vaccination of Infants with Meningococcal Group B Vaccine (4CMenB) in England. N Engl J Med 2020;382:309-17 (DOI: 10.1056/NEJMoa1901229). Met editoriaal: Harrison LH en Stephens DS. Good News and Bad News — 4CMenB Vaccine for Group B Neisseria meningitidis. N Engl J Med 2020;382:376-8 (DOI: 10.1056/NEJMe1916440)
3 Rodriguez FM, Marlow R et al. Association of Use of a Meningococcus Group B Vaccine With Group B Invasive Meningococcal Disease Among Children in Portugal. JAMA 2020; 324:2187-94 (DOI: 10.1001/jama.2020.20449 (met bespreking in NEJM Journal Watch, 16/12/2020)
4 Castilla J, Cenoz MG, Abad R et al. Effectiveness of a Meningococcal Group B Vaccine (4CMenB) in Children. N Engl J Med 2023;388:427-38 (DOI: 10.1056/NEJMoa2206433)
5 RIVM. Meningokokken-meningitis en -sepsis. Richtlijn. Cliquez ici.
6 Marshall HS, McMillan M et al. Meningococcal B Vaccine and Meningococcal Carriage in Adolescents in Australia. N Engl J Med 2020;382:318-27 (DOI: 10.1056/NEJMoa1900236). Met editoriaal: Harrison LH en Stephens DS. Good News and Bad News — 4CMenB Vaccine for Group B Neisseria meningitidis. N Engl J Med 2020;382:376-8 (DOI: 10.1056/NEJMe1916440)
7 LRP. Vaccination contre le méningocoque B. La Revue Prescrire 2022;42:687-1 en 687-2